Pourquoi êtes-vous « le rigolo de service » ?

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Publié le 31/10/2017 par TRD_import_MariaPoblete , Mis à jour le 28/09/2023 par TRD_import_MariaPoblete
Faire le clown pour rigoler un peu, pourquoi pas... En cours et tout le temps, c’est gênant. Et si vous réfléchissiez à ce qui vous pousse sans cesse à amuser la galerie... Trendy vous aide à comprendre.

« Dans la vie, je ne suis jamais sérieuse, je prends tout sur le mode de la plaisanterie, je tourne en dérision le moindre problème et même des situations délicates. En cours, j’ai l’habitude de faire rire, je réponds aux professeurs, je lance de bonnes blagues et je fais le clown. Je suis assez douée ! Je sais que je vais déclencher l’hilarité… même si, en retour, je me prends des savons. Au début, les professeurs trouvaient ça marrant,puis ils se sont lassés. Oui, je sais que je perturbe la classe, mais j’ai du mal à me contrôler.  » Louise, 15 ans, de Caen, se laisse facilement déborder par ses émotions et se dit « trop franche, sincère, cash, vraie ! » La perspective d’entrer en première S la secoue un peu. Elle a décidé d’arrêter. « J’ai l’intention de me calmer parce que les sanctions tombent, ça refroidit et puis je vais m’intéresser à mes études ! Je ne suis plus une gamine… » Louise dit aussi vouloir être présente autrement qu’en faisant le pitre.

« Certaines manifestations comportementales des élèves chahuteurs sont une réponse à une envie de montrer leur présence et de se faire entendre. C’est paradoxal parce que ce n’est pas toujours conscient, suggère Joël Clerget, psychanalyste à Lyon. Ils sont étonnés des réactions parfois violentes des enseignants, avec des sanctions, des convocations de la famille. De leur point de vue, ils font les pitres pour être entendus, rien de plus.  » Comme disait le célèbre psychologue D.W. Winnicott, les réactions qui ne sont pas pathologiques – et c’est ici le cas – sont un signe de bonne santé. Vous vous manifestez : c’est vivant… à condition de rester dans un équilibre raisonnable et sans gêner les autres.

Trouver l’origine de ce comportement

« Je conseille aux élèves qui sont comme moi de réfléchir pour quelle raison ils en font des tonnes, déclare Louise. Il faut savoir à quel moment de la journée, avec quels professeurs, dans quels cours ou dans quelles situations ils font leurs pitreries : est-ce qu’ils souffrent, y a-t-il des moments où ça s’arrange, lorsqu’ils sont plus calmes ? » De la même façon, vous pouvez vous demander si ça vous gêne, si vous êtes content de vous, si vous avez des ennuis en famille, avec vos amis, vos amours… »

Marguerite, 21 ans, en licence information et communication à Lyon, cherche à comprendre ses provocations. « Jusqu’au collège, j’étais une élève modèle. Mon arrivée en seconde et une crise existentielle qui s’est déclenchée en même temps ont métamorphosé mon comportement. Lorsqu’on est adolescent, c’est fondamental d’obtenir la validation de son cercle social. Au collège, j’avais la reconnaissance des professeurs et de mes parents : ça me suffisait. En seconde, j’ai eu le sentiment de ne pas ‘exister’ assez. Alors je me faisais remarquer en cours : je parlais, je lançais des blagues, je riais fort. Les professeurs me réprimandaient et j’en étais fière. Lorsqu’on me mettait à la porte, l’attention était portée sur moi, j’étais le centre de la classe, le centre du monde. Je ne voyais pas le danger de mon attitude. Puis, durant la seconde, quand les questions du choix de filière se sont posées, j’ai compris ce qui se jouait. Je ne voulais pas louper ma scolarité. Cette réussite avait toujours été fondamentale pour moi et j’ai réalisé que je devais changer. J’ai coupé court à mes pitreries et je me suis recentrée sur le travail. On m’a laissé passer en première littéraire. J’ai tiré leçon de mes erreurs et j’ai réussi à mûrir à temps. »

Parlez de votre malaise avec un adulte

L’essentiel est de savoir, honnêtement, si vos pitreries vous gênent, vous mettent en souffrance. « Est-ce que ça exprime un problème ? Est-ce temporaire, subi ou ancré depuis des années ? Êtes-vous content de vous ? Si cette attitude vous met mal à l’aise, il est bon de parler de ce malaise avec un adulte du lycée, un enseignant, un CPE (conseiller principal d’éducation), un membre de la famille. Il suffit parfois de peu pour comprendre ce que l’on cherche », conseille Joël Clerget. La scène scolaire n’est pas le meilleur endroit pour exprimer son humour. C’est décalé, et vous vous sentez rejeté, puni, malheureux.

Faites baisser les tensions

Le résultat de l’enquête intérieure de David, 17 ans, a abouti à la révélation d’un « épuisement mental, dû à une trop forte pression« . « J’ai explosé à cause de rapports difficiles avec des filles au lycée. Je me sentais rejeté. J’arrivais d’un village et je n’étais pas comme les autres. Je n’assumais pas mes difficultés relationnelles et scolaires. C’était nouveau pour moi et je ne m’attendais pas à ça. Alors, pour me faire admettre par les élèves de ma classe et être populaire, je me suis mis à répondre, je disais des trucs marrants, j’imitais même les profs ! C’est celui de gymnastique qui m’a convoqué pour me parler. Il m’a expliqué comment sortir de cette situation, en essayant de changer de rôle dans la classe, et surtout en me mettant au travail pour réussir et exister autrement. Je l’ai compris et je l’ai revu plusieurs fois pour discuter de mon attitude. Je ne suis pas allé en conseil de discipline parce que c’était l’accord que j’avais passé avec lui. Maintenant, franchement, ça va ! Après quelques semaines, c’était réglé. »

N’hésitez pas à dévoiler vos peurs

Philosophe, Anna, 15 ans, l’est aussi, à sa manière. « On dit de moi que j’étais une vraie tête à claques et que personne ne pouvait me parler sérieusement, raconte-t-elle. En fait, je suis une personne très angoissée, alors je me cache derrière mes bêtises et mes blagues. Puis, un jour, ma meilleure amie m’a engueulée parce que je disais n’importe quoi alors qu’elle essayait de me parler sérieusement. Ça m’a vraiment secouée ! En réalité, j’en rajoute toujours des couches pour qu’on me voie, et je ne prends rien au sérieux. » Ce que tente d’expliquer Anna, c’est sa protection, la distance qu’elle pose entre le monde et elle-même.

Et si l’une des solutions était de s’accepter, avec ses défauts, ses hésitations ? Vous pouvez dévoiler vos peurs. La perfection n’existe pas. Vous êtes unique, inutile de vous cacher derrière un masque !