“Papa-maman, ça va, j’ai plus 10 ans !”

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Publié le 28/11/2014 par TRD_import_AudeLorriaux ,
"Fais attention a tes affaires", "Ne rentre pas trop tard", "Ne mange pas ça".... Quand vos parents vous parlent, vous avez (souvent) l'impression qu'ils vous prennent pour un gamin, meme quand vous avez largement fete votre majorite ! Vous n'en pouvez plus d'etre infantilise(e) mais doutez de pouvoir les changer ? Voici quelques techniques pour aider votre message a passer…

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Vos parents ne vous voient pas grandir ? À vous de leur faire comprendre que vous aussi vous êtes maintenant adulte. // © Plainpicture._

Pas facile d’avoir ses parents constamment sur le dos. Ils angoissent pour de multiples raisons, et notamment financières : mon fils ou ma fille va-t-il/elle être capable de gérer son budget ? Ne vais-je pas recevoir un jour un coup de fil de la banque ou du propriétaire annonçant une « catastrophe » ? Tel est le genre de questionnements qui les taraudent. Stéphanie, 24 ans, en a souffert alors qu’elle était en fac de sciences, quand son budget était alors très serré. « Dès qu’il y avait un imprévu mes parents me disaient ‘fais attention’ et ne me croyaient pas capable de m’en sortir », raconte-t-elle. Pourtant Stéphanie est selon elle très bien organisée.

« Ils me parlent comme si j’étais un bébé »

Pour Marjorie, 26 ans, aujourd’hui en master 2 d’informatique, le contrôle s’exerce surtout sur sa façon de s’habiller, de s’alimenter et sur les sorties. Elle aime les tenues « militaires » et se dit elle-même « un peu garçon manqué », ce qui n’est pas du goût de ses parents : « Ils me parlent comme si j’étais un bébé », explique-t-elle, dépitée. Elle doit par ailleurs faire ses courses avec sa mère car elle n’a pas de véhicule. Et ces achats en duo sont l’occasion de remarques incessantes : « À chaque fois que je prends un truc, elle me dit que ce n’est pas bon pour ma ligne », se désole-t-elle.

D’abord comprendre ce qui angoisse autant vos parents

Mais pourquoi les parents agissent-ils ainsi ? Comprendre, étymologiquement, c’est « prendre avec » (com-prendre), essayer en somme de « faire avec ce qu’ils sont », explique la psychiatre Christine Barois. Et cela demande un peu de recul. Qu’est-ce qu’être parent ? Rappelez-vous que pendant des années, les enfants sont une de leurs principales occupations. Lorsque ceux-ci s’autonomisent, cela peut devenir difficile à vivre : ils ressentent un vide et se sentent inutiles. « Ils ont trop investi leur rôle », explique la psychiatre.

D’autant que l’époque a changé, et que leurs repères sont un peu bouleversés. Par exemple, les représentations du « genre », du couple et l’image des femmes ont évolué. « Ma mère me dit que ce que je porte « n’est pas assez féminin », rapporte Marjorie. Peut-être parce que le « féminin » d’aujourd’hui n’est pas celui d’hier ? « À mon âge, ils étaient déjà mariés… » constate de son côté Stéphanie.

Quant au marché du travail, ils se rendent bien compte qu’il est plus complexe, mais fonctionne encore en partie sur le même modèle : « Pour eux, tant qu’on n’a pas de travail, on n’est pas un adulte », explique Marjorie. Dans ce cas, leur rappeler quelques chiffres – comme 27 ans, la moyenne d’âge à laquelle on accède aujourd’hui en France à son premier CDI – devraient les aider à relativiser !

Exprimez ce que vous ressentez

Comment rassurer les parents angoissés ? Après avoir essayé de poser un « diagnostic », une des premières choses à faire est d’en discuter. Patiemment, en énonçant ses arguments, Stéphanie a réussi à vaincre les résistances de ses parents, inquiets à l’idée de la voir contracter un prêt : « Je leur ai dit que ça me ferait une première expérience dans ce domaine. » Marjorie leur a montré « que tel ou tel vêtement était déjà porté par plein d’autres gens », et notamment des femmes.

Exprimer ses besoins est essentiel selon le docteur Barois : « Souvent, les jeunes n’osent pas dire ce qu’ils ressentent, car ils ont trop peur du conflit », analyse-t-elle. Or c’est précisément l’inverse qu’il faut faire ! Facile à dire ? Pour s’imposer sans déclencher la « guerre », la psychiatre conseille les techniques de la communication non violente, qui vous seront utiles en de nombreuses circonstances. En quoi consistent-elles ? Elles procèdent en quatre étapes, très faciles à retenir. Premièrement, savoir dire les faits : quelle est la situation ? Quelles sont les remarques que je subis ? Dans un second temps, il faut arriver à exprimer ce que cela crée en soi, ses émotions : ressent-on de la colère, de l’injustice ? Dans un troisième temps, il faut pouvoir poser ses besoins (raisonnables) : est-ce que je veux qu’on m’accorde plus de temps pour sortir le soir ? Être mieux compris ? Mieux respecté dans mes choix ? Enfin il est bon de formuler des propositions concrètes. « Une technique qui marche à tous les coups », selon Christine Barois.

Faire des compromis et accepter des conseils parfois utiles

Entrer dans une démarche de compréhension plutôt que de conflit vous permettra plus facilement de faire des compromis, essentiels pour arriver à montrer que « tout le monde fait des efforts ». Chacun fait un pas vers l’autre. C’est un contrat ‘gagnant-gagnant' » explique le docteur Barois. Quel type de compromis peut-on faire et accepter ? On peut par exemple s’engager à être plus transparent et se fixer des limites. Si vos parents ont une angoisse par rapport à l’alcool et ne vous laissent pas sortir à cause de cela, il faut parvenir à leur dire que vous ne boirez pas plus d’un « shot » par soir. Si vos parents se rendent compte que vos efforts pour vous fixer une limite raisonnable sont sincères, ils auront plus confiance en vous, même si ce n’est pas toujours « parfait ».

D’autant que faire des compromis et être à l’écoute des demandes de ses parents peut se révéler utile, avec le temps. C’est ce qu’ont réalisé Stéphanie et Marjorie, chacune à leur manière : « Au niveau budgétaire, ils m’ont aidé, donc parfois cela m’a servi », concède la première . « En entrant dans l’âge adulte, j’ai compris que ma mère n’avait pas totalement tort. On est dans un monde où tout le monde réagit à la façon dont les gens sont habillés et je n’ai pas envie qu’on me mette dans une catégorie. D’une certaine manière, je leur suis reconnaissante », résume Marjorie.

Rationnaliser, montrer des preuves

Si malgré toute les discussions et les compromis opérés, le blocage persiste, ne vous désespérez pas. Il reste encore une solution : accumulez des preuves ! C’est ce qu’a fait Stéphanie, qui avait établi pour son prêt une feuille budgétaire avec d’un côté toutes ses rentrées d’argent, de l’autre, toutes les dépenses. D’une manière générale, rationnaliser rassure. Se renseigner et montrer que l’on « connaît le sujet » permet de calmer un peu des parents paniqués par l’inconnu. S’ils n’ont pas l’habitude de boire, il y fort à parier que la moindre goutte d’alcool est synonyme chez eux de « coma éthylique ». Expliquer et décrire ce qu’est un coma éthylique, les symptômes, les étapes, leur prouvera que vous êtes conscient du danger et capable de l’anticiper.

Au final, vous verrez, tout s’arrange. « Aujourd’hui, ils n’ont plus d’angoisse », explique Stéphanie. Idem pour Marjorie, désormais en couple avec son ami, ce qui a eu pour effet de rassurer ses parents. Avec un peu de patience….