« Si tu parles, t’es une balance” : quand alerter ou pas ?

No thumbnail
Publié le 01/05/2015 par TRD_import_AudeLorriaux ,
Un camarade vous confie qu'il a des problemes avec d'autres eleves, mais vous demande de ne surtout rien dire. Serez-vous une "balance" si vous desobeissez ? Et si vous etes temoin d'une triche concertee, est-ce "reglo" d'aller voir le prof ? Trendy vous aide a faire la part des choses entre "denoncer" et "temoigner utile", pour eviter que cela ne se retourne contre vous.

Difficile, parfois, de bien distinguer la « dénonciation » du « témoignage utile ». Surtout, dans le feu de l’action. C’est ce qui est arrivé à Charlotte – aujourd’hui en terminale –, lorsqu’elle était au collège. Alors qu’elle a cours d’anglais, un téléphone sonne, sans que le prof ne parvienne à localiser la sonnerie. L’enseignant décide alors de ramasser tous les portables, qui ne seront rendus aux élèves qu’en fin de journée dans le bureau du proviseur, sauf si le « coupable » se dénonce. Chacun connaît le fautif, mais personne ne « cafarde »… jusqu’à la fin du cours, où le professeur se retrouve avec une poignée d’élèves. Une étudiante se tourne alors vers Charlotte : « Toi tu as entendu qui a fait cela, dis-le ! » Sous le regard insistant du professeur et la pression de certains élèves, Charlotte finit par lâcher un nom.

Oui, certains « balancent » par jalousie

Bien mal lui en a pris ! L’étudiante qui l’avait incitée à parler s’est empressée d’aller tout raconter au « coupable ». « Cet élève était violent. Il ne me portait déjà pas dans son cœur. Mais après, il m’a carrément prise en grippe, et à chaque fois qu’il le pouvait, il me rabaissait », raconte Charlotte, « balance » bien malgré elle et victime assurément. Morale de l’histoire : si personne n’est en danger ; si ce que chacun risque au plus est de se faire confisquer son portable une journée, gardez votre langue dans votre poche ! « Les professeurs ne se rendent pas compte que les élèves sont cruels entre eux. Quelque chose qui semble aller de soi peut se transformer en situation compliquée », analyse aujourd’hui la jeune fille.

D’autres personnes, à la différence de Charlotte, vont « balancer » au prof par jalousie. « Ce sont des jeunes qui sont habiles avec les règles et les utilisent comme des armes. Ils ne seront pas forcément valorisés par leurs camarades mais vont être craints », explique Grégory Michel, professeur de psychologie à Bordeaux, chercheur à l’INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale) et auteur de « la Prise de risque à l’adolescence ». Ces ados-là devraient éviter de jouer avec le feu, car une fois leur manipulation découverte, la sympathie de leurs camarades peut vite retomber.

Les questions que vous pouvez vous poser avant d’aller parler

Pour savoir si l’on ne risque pas d’être une « balance », il faut se poser plusieurs questions : qu’est-ce qui est en jeu ? Est-ce que je fais cela pour le bien de la personne, ou non ? Est-ce que la personne que je prétends « aider » est une personne fragile ? Ainsi, si un camarade triche ou vous parle en mal d’un professeur, vous ne serez pas un « témoin utile » en allant prévenir ce dernier, parce que l’enseignant n’est pas dans une situation de fragilité. En revanche, si un élève vous confie être harcelé par d’autres élèves, tout en vous demandant de garder le silence, il faut absolument réfléchir à la situation, sans avoir peur de passer dans un premier temps pour une « balance » parce que vous aurez alerté les autorités.

Dans le cas d’un élève harcelé, ce que vous pouvez d’abord tenter

Première chose à faire : essayez de convaincre votre camarade harcelé d’en parler autour de lui, comme à ses parents, pour rompre l’isolement. Un individu seul et qui porte tout seul son fardeau souffre en effet bien plus qu’un individu qui trouve du soutien autour de lui.

Avant d’alerter le professeur, pensez à appeler, avec votre camarade si c’est possible, le numéro « Stop harcèlement » : le 0.808.807.010. Ce numéro permet de dialoguer avec des spécialistes du harcèlement scolaire, qui vous mettront en relation avec le « référent harcèlement » de votre académie en cas de besoin.

Deuxième option : l’infirmière ou la médecine scolaire de l’établissement. En dernier recours, pensez au professeur, si vous avez confiance en lui. Attention, car tous les enseignants ne sont pas forcément formés au harcèlement, d’où la possibilité – ce sont aussi des êtres humains ! – qu’ils commettent involontairement des bêtises et que leur intervention soit contre-productive. Charlotte se souvient ainsi d’une histoire ayant mal tourné après qu’un élève a voulu aider son ami harcelé. Après avoir demandé à l’élève harcelé de sortir de la classe, le prof a passé un savon au reste des présents, en promettant des sanctions. Ce qui a eu pour conséquence d’attiser la haine de ses camarades contre le harcelé…

« Il vaut mieux utiliser la méthode ‘Pikas’ : impliquer les harceleurs en leur demandant comment aider les harcelés, sans les culpabiliser « , commente Charlotte, qui participe dans son lycée à des actions contre le harcèlement scolaire. Et de conclure : « Balance je trouve cela idiot comme terme. On ne peut pas être considéré comme une balance si on fait cela pour le bien de la personne. »