Pourquoi ces étudiants se sont fait tatouer

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Publié le 05/04/2017 par TRD_import_LauraMakary ,
Plus d'un quart des moins de 35 ans sont tatoués. Parmi eux, de nombreux étudiants, qui n'hésitent pas à multiplier les tatouages, parfois dans un laps de temps très court. Souvent pour des raisons très diverses. Témoignages de jeunes qui ont sauté le pas.

D’après une étude IFOP de janvier 2017, 14 % de la population française est tatouée . Les jeunes sont clairement les plus représentés : 27 % des moins de 35 ans ont déjà encré leur peau d’un ou de plusieurs tatouages. Parmi ceux-ci, de nombreux étudiants ont déjà franchi la porte d’un tatoueur, avec des raisons variées, et qui sont propres à chacun. Et derrière chaque tatouage se cache une histoire.

Quand il s’agit d’expliquer la volonté qui leur est venue de passer à l’acte, la plupart évoque la beauté spécifique de cet ornement corporel. Ainsi selon l’étude IFOP, 80 % des 18-24 ans estiment que le tatouage est un art. Comme Soizic, 20 ans, en contrat de professionnalisation à Ecofac, au Mans, pour devenir employée de commerce. « J’ai deux tatouages, un arbre et un cœur humain. Ils n’ont pas une signification particulière, mais j’avais ces idées en tête depuis longtemps et ce sont des dessins qui me plaisent beaucoup « , explique-t-elle.

Un hommage à une personne importante

Le tatouage peut aussi être un hommage à une personne. Iris, 21 ans, travaille à la mairie de Lyon, et a inscrit le prénom de sa petite sœur, Oriane, sur son avant-bras gauche. « Tout simplement parce que c’est la personne la plus importante de ma vie. Au début, elle n’était pas emballée, mais finalement, ce geste l’a touchée », déclare-t-elle. C’est également le choix de Nicolas, 18 ans, à l’IUT de Saint-Denis. Pour lui, c’était la date de naissance de sa mère. Un geste comme une évidence. « J’aime beaucoup ma mère, elle n’a pas eu une vie facile, donc c’est un hommage. Elle était très contente et c’est même elle qui me l’a offert. « 

Antoine, étudiant au Conservatoire libre du cinéma français, s’est fait tatouer en l’honneur d’un musicien : Lemmy Kilmister, de Motörhead. « J’ai eu une enfance difficile et quand j’ai découvert ce groupe, ça m’a touché, comme si certaines de leurs chansons avaient été écrites pour moi. Lemmy est vite devenu un modèle , une figure paternelle que je n’ai pas eue », raconte-t-il. Il a depuis encré un autre visage sur sa peau : l’acteur Robin Williams.

Une étape vers la reconstruction

D’autres étudiants ont recours au tatouage pour marquer un moment fort ou un tournant dans leur vie. Camille, 21 ans, en master MEEF à l’Espé de Paris, a fait son premier tatouage dans cette optique : « C’est une montre à gousset, avec une branche de laurier. J’ai fait ce tatouage à une date symbolique : neuf ans après un grave accident qui m’a laissé de nombreuses séquelles. L’heure inscrite dessus est celle de l’accident. Il symbolise à la fois cette date marquante et le temps qui passe. Et le laurier est une métaphore de la victoire, parce que j’ai réussi à surmonter ce traumatisme « , détaille-t-elle.

Même cheminement pour Ségolène, 27 ans, en MBA direction artistique à Sup de Pub. Elle était au Petit Cambodge lors des attentats de Paris en novembre 2015. En mémoire, un an après, elle a choisi le blason de Paris. « J’ai mis un an à me renconstruire. Ce tatouage incarne cette épreuve qui m’a fait grandir et qui a changé ma vision de la vie. C’était le point d’orgue de ma reconstruction, j’ai intégré que j’ai survécu et que la vie continue, même si je resterai à jamais marquée par cet événement « , souligne-t-elle.

Un marqueur identitaire

Autre cas de figure : un marqueur de sa propre identité. Mina a 22 ans et étudie en alternance à l’INSA Centre – Val-de-Loire. Pour comprendre son tatouage, un soleil sur le flanc, des explications s’imposent. « Je suis Kurde, c’est le soleil du drapeau kurde d’Irak, avec 21 piques symétriques. Avec l’État islamique qui a envahi mon pays, je ne me suis jamais sentie aussi kurde et si fière de l’être. Ce tatouage est intemporel et je ne le regretterai pas, car mon identité ne changera jamais. « 

Éviter les zones trop visibles

Néanmoins, même pour les plus tatoués, les jeunes font attention à choisir des zones peu visibles, notamment vis-à-vis de leurs études et leur travail. Lydia, étudiante à l’IFSI d’Évreux, possède quatre tatouages. « C’est surtout pour les concours qu’il faut les cacher ! Mais pas de souci à l’école. En stage, il faut veiller à anticiper les réactions des patients quand on est tatouée sur l’avant-bras, surtout chez les plus âgés ou les très religieux », estime-t-elle.

Morgane, à l’IUT de Niort, en a huit. « Pour le travail, j’évite les endroits trop visibles, comme les bras. Même si le tatouage se démocratise, tous lespatrons et recruteurs ne sont pas compréhensifs et tolérants « , lance-t-elle.

L’appréhension des réactions familiales

Certains cachent leurs tatouages à leurs familles, principalement par peur des remarques et des conflits. Camille, 21 ans, étudie elle aussi à Niort. Entre ses 18 et 21 ans, elle s’est fait encrer neuf fois. « Mes parents ne savent pas que je suis tatouée. J’en ai parlé à ma mère avant de faire le premier, mais elle pensait que c’était  » un délire qui me passerait  » et m’a fait la morale. Je trouve triste qu’ils pensent que le fait d’avoir un tatouage fasse de moi une fille différente de celle qu’ils ont élevée. Donc je ne leur en parle pas, pour éviter le conflit « . D’autant qu’elle prévoit de « remplir entièrement » sa jambe droite.

Mike* (prénom modifié) a 24 ans et deux tatouages : deux ailes d’ange qui entourent la date du décès de sa grand-mère, et un puzzle, formant les mots « Family », « Home » et « Love ». Son entourage n’est pas du tout au courant. « Je préfère rester anonyme et ne pas leur dire, car ma famille n’est pas ouverte au tatouage, d’un point de vue culturel et religieux. J’ai peur qu’elle le prenne mal, je fais donc attention à les cacher et à ne pas poser torse nu sur les photos. J’en ai parlé avec mes amis, qui étaient surpris de me savoir tatoué, connaissant mon contexte familial », confie le jeune homme.

Quoi qu’il en soit, la quasi-intégralité des étudiants interrogés assurent vouloir réitérer l’expérience et se faire tatouer à nouveau. Ce qui confirme qu’une fois qu’on y a goûté, on devient vite accro. Pour le symbole, des raisons esthétiques ou juste pour le fun, les tatouages vont donc continuer à être présents dans les écoles et les universités, à travers celles et ceux qui ont fait le choix de les porter.

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