Mes parents ne m’écoutent jamais : comment me faire entendre ?

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Publié le 21/09/2016 par TRD_import_MariaPoblete , mis à jour le 02/10/2023
Vous avez l’impression de parler dans le vide ? Vos parents ne tiennent pas compte de vos désirs, de vos revendications, de vos choix ? Voici quelques conseils pour relativiser et avancer malgré le manque d’attention.

À 20 ans, Olga, en L3 de sciences économiques à Paris 1 – Panthéon-Sorbonne, commence à se calmer, après une adolescence difficile et conflictuelle :  » Le sentiment de ne pas être écoutée m’a longtemps poursuivie , explique-t-elle. Dès 13 ans, des idées, des envies me sont apparues qui étaient à l’opposé de celles de mes parents. Je voulais sortir, voir mes amis, sécher les cours, traîner au parc, aller en soirée, me saouler, fumer…

Pour m’amuser, pour être appréciée, pour faire comme tout le monde. C’était un besoin vital. Chaque interdiction était une tragédie. À cet âge-là, on ne se raisonne pas, on vit ce que l’on ressent, c’est tout. Et ce que je ressentais était puissant : du pur désespoir. »

Derrière les revendications et le besoin d’être écouté, vous avez souvent autre chose à dire.  » Écouter demande de la disponibilité, du temps, une attention réelle « , suggère Joël Clerget, psychanalyste. Vous avez l’impression de hurler dans le vide ? Vous avez raison, c’est bien de cela qu’il s’agit.

Inutile de hurler

Luca, 17 ans, en terminale L au lycée Jean-Perrin à Lyon, était un enfant colérique. Pour faire face à ses « grimpées aux rideaux », ses parents ont eu la bonne idée de l’inscrire àdes cours de kung-fu. « À 15 ans, ma vie a changé, dit-il. Le kung-fu est un art martial excellent qui permet de retourner la force de l’adversaire en notre faveur, c’est l’art du calme et de la maîtrise. *

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Au lieu de m’énerver et de réclamer l’attention de mes parents, je sais exposer tranquillement mes demandes. L’autre soir, je voulais le feu vert pour une semaine de camping, et ce n’est pas évident parce qu’on est tous mineurs, mes potes et moi. Eh bien, j’ai parlé posément… et ils ont accepté ! » Luca n’ignore pas que le kung-fu est aussi l’art de la diplomatie ! Pour être écouté (et donc entendu), l’environnement et les conditions comptent énormément (sauf si vous demandez la lune, mais ça, vous savez que c’est impossible)…

Manipulation ou dialogue, à vous de juger…

Louis, 20 ans, en L2 de théâtre à Paris 3 – Sorbonne-Nouvelle, revient sur ses années de collège et de lycée, au cours desquelles, dit-il, il n’était pas « du tout » écouté. Il a bataillé : « Mon père n’a pas eu une scolarité rangée et classique telle qu’on considère les choses aujourd’hui. Il m’a poussé à suivre le parcours du « bon élève », en voulant me forcer à prendre latin et allemand. On a dû se poser calmement autour d’une table, tous les deux, et exposer les tenants et aboutissants du problème , le « pourquoi » des choix à faire, les différentes possibilités… *

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On est arrivés à un compromis : soit j’apprenais l’allemand en quatrième et je ne prenais aucune option de langue morte, soit j’apprenais l’espagnol et je devais choisir latin et grec. C’est pour cette dernière possibilité que l’on a opté, ensemble. Avant de discuter sérieusement, j’avais le sentiment d’être brimé, de n’être écouté à aucun niveau, et je ne comprenais pas ce qui motivait mon père , mais on a réussi à trouver une solution. »

Pour Louis, la clé a été le dialogue , long et patient. « Pour convaincre mon père, je me suis inspiré de l’exemple de proches, comme ma sœur, qui a toujours suivi son instinct et a su faire les bons choix même si mon père la désapprouvait parfois. Finalement, j’ai réussi à bien vivre cette période qui paraissait difficile, et j’en suis sorti plus fort et plus mature. Aujourd’hui, je ne la regrette pas. »

Avis d’expert : Joël Clerget, psychanalyste

« Vous voulez être écouté et entendu dans la minute »

« De mon point de vue de psychanalyste, lorsque vous dites que vous n’êtes pas écouté, cela exprime quelque chose de particulie r. Il y a une plainte et une crainte. C’est tout le paradoxe de l’adolescence : vous êtes altruiste, très intéressé par les autres et aussi par vous-même. Vous voulez que les adultes, vos parents, les enseignants, vous écoutent et vous entendent de suite, dans la minute quasiment. Et en même temps, vous cherchez à vous en éloigner.

Vous êtes souvent dans l’immédiateté, dans l’égocentrisme et, si par malheur les adultes repoussaient leur réponse, leur réaction, leur disponibilité, cela équivaudrait à une non-écoute, une absence de réponse. Or c’est assez difficile d’être disponible tout le temps et quand vous le voulez surtout. Je comprends tout à fait ce désir d’être en relation, cette demande d’attention. Écouter, c’est être avec. Cela crée un lien fort. Et pour vous, c’est précieux. »