Ma coloc a 90 ans

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Publié le 21/09/2012 par TRD_import_SégolèneBarbé ,
Vivre chez un papi ou une mamie le temps de ses etudes, c'est comment ? Rencontre avec Linxin, 24 ans, et Colette, 91 ans, qui entament une nouvelle annee de cohabitation en plein coeur du quartier Latin, a Paris.

Colette ne voulait plus vivre seule, Linxin souffrait loin de sa famille : vive la coloc ! // DR

Arrivé de Chine il y a 4 ans pour suivre des études de droit, Linxin a d’abord vécu à Lyon (69), déjà en colocation intergénérationnelle. Depuis le mois de février 2012, il occupe une chambre à Paris dans l’appartement de Colette, rencontrée via l’association Ensemble 2 générations. En échange, le jeune étudiant chinois s’acquitte de quelques services (la vaisselle, les courses de temps en temps) et, surtout, assure une présence rassurante le soir et le week-end. Un échange de bons procédés qui leur permet aussi de tisser des liens, de trouver un nouvel équilibre, chacun à un moment différent de leur vie…

Linxin, 24 ans : “ Chez Colette, je trouve un cadre qui m’aide à travailler”

“Bien sûr, c’est une formule intéressante sur le plan financier, mais c’est surtout plus chaleureux. Par exemple, à mon arrivée, Colette a organisé une petite fête avec des voisins pour me souhaiter la bienvenue dans l’immeuble. J’ai eu aussi l’occasion de vivre quelques mois dans un petit studio, mais j’ai trouvé ça difficile : loin de ma famille, je me sentais seul, j’avais tendance à manger à n’importe quelle heure… Chez Colette, je trouve un cadre qui m’aide à travailler dans de meilleures conditions.

Nous dînons ensemble tous les soirs à 20 heures, ce qui ne nous empêche pas de garder une certaine liberté : chacun se prépare ce qu’il veut à manger, d’ailleurs, nous avons chacun notre étagère dans le frigo. Souvent, on regarde le journal télévisé ou bien on parle littérature, parfois elle me conseille des films… Ce que je préfère, c’est lorsqu’elle me fait partager ses souvenirs, lorsqu’elle me parle de la guerre, de sa carrière de comédienne, de journaliste.

Il y a aussi certaines contraintes, c’est normal, je dois être souvent disponible, même la nuit… Mais je peux aussi sortir de temps en temps, il faut juste que je prévienne Colette, elle est toujours d’accord. Je la considère un peu comme ma grand-mère. Prendre soin d’elle, ce n’est pas vraiment une obligation, c’est plutôt un enrichissement. Pour un jeune, c’est aussi une opportunité : ça aide à grandir, à devenir plus responsable.”

Colette, 91 ans : “Sa présence me rassure”

“J’ai l’habitude de vivre seule depuis longtemps mais, à partir d’un certain âge, ça devient un peu risqué… Lorsque l’association m’a présenté Linxin, il m’a plu tout de suite : j’ai su immédiatement que si je lui offrais une chambre, il m’offrirait aussi quelque chose en retour. Il est très sérieux, très fiable, il rentre toujours à l’heure.

Sa présence me rassure et, comme je suis très bavarde, j’aime avoir quelqu’un à qui parler. On fait parfois des petites promenades dans le quartier, et puis, pour la dernière élection présidentielle, il m’a emmenée voter. J’ai des amis de différentes nationalités, je m’intéresse au monde qui m’entoure, alors j’apprécie cette ouverture qu’il m’apporte sur une autre culture, une autre façon d’être.

Je trouve qu’il est très raffiné, très silencieux. À côté de lui, je me sens un peu grossière, un peu bruyante… Et puis, j’admire son côté sérieux, travailleur. Moi, j’ai travaillé toute ma vie, mais j’étais plus dans la légèreté. D’ailleurs, je lui dis parfois qu’il devrait s’amuser davantage !

Linxin adore écouter Colette lui raconter ses souvenirs de guerre, de comédienne… // DR

Grâce à cette cohabitation, je me rends compte que, même à mon âge, je peux encore apprendre des choses sur moi-même. Par exemple, lorsqu’il m’a annoncé au début de l’été qu’il voulait rentrer quelque temps en Chine pour voir ses parents, j’ai très mal réagi, je n’étais pas préparée. Je me suis aperçu que j’avais été égoïste, alors j’ai réfléchi, je me suis excusée…

Finalement, il a appelé ses parents et a décidé de rester avec moi cet été. Cela m’a beaucoup touchée, mais je sais que, la prochaine fois, ce sera à moi de m’organiser pour ne pas rester seule pendant son absence.”