L’interview indiscrète : les premières fois de Jules Plisson, rugbyman

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Publié le 22/03/2017 par TRD_import_ErwinCanard ,
SPORT. Rugbyman international et étudiant, c'est possible ! Jules Plisson en est la preuve, avec un parcours sans faute, en club, en équipe de France comme dans ses études. Il a quitté le terrain un instant, pour revenir sur ses débuts.

Rugbyman international français (13 sélections), Jules Plisson, 25 ans, occupe le poste d’ouvreur (numéro 10) au Stade Français. Titulaire d’un bac ES et d’un bachelor de l’INSEEC, ce natif de Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine), qui a fait jusque-là toute sa carrière au sein du club parisien , vous raconte ses premières fois. Le tout avant de retourner sur les bancs de l’école , puisqu’il s’apprête, en parallèle de sa carrière, à commencer un master à Sciences po.

La première fois que… j’ai stressé pour un examen

Je n’avais pas de très bonnes notes. En 6e, avant un contrôle de français, ma mère m’a dit que si je n’avais pas une bonne note, je ne jouerais pas mon prochain match de rugby… J’ai eu juste la moyenne et j’ai pu y aller. Je ne pense pas qu’elle m’aurait empêché d’y aller, elle voulait juste me mettre un coup de pression !

La première fois que… j’ai eu « une taule » à un examen

Ce n’est pas vraiment une taule, mais c’est la fois où j’ai été le plus déçu : pour les TPE, au bac. Nous étions trois dans le groupe mais j’avais fait seul les trois quarts du boulot. Le jury était composé de deux profs, dont un que j’avais eu en seconde. Il avait refusé de me laisser partir en sport-études, en disant que je ne serais « pas capable de concilier sport et études ». Quand j’ai réalisé qu’il était dans le jury, j’ai compris que ça allait être compliqué. Je me souviens très bien de son nom et de sa tête… Résultat : j’ai eu 10, et les deux autres, 15 et 16… Mais, depuis, je pense que je lui ai donné tort !

La première fois que… j’ai séché

Jamais ! Je crois que j’avais très peur de ma mère, enfin surtout qu’elle m’interdise d’aller au rugby si elle savait que je n’étais pas allé en cours !

La première fois que… j’ai pris un appart

C’était quand je suis rentré au centre de formation du Stade Français, j’avais 18 ans. Le club mettait à notre disposition des appartements en colocation. C’était bizarre de partir de chez mes parents, de faire la cuisine, le ménage, de prendre un abonnement EDF… D’ailleurs, au début, j’oubliais de le payer et on m’a coupé l’électricité une semaine ! J’ai aussi eu des vers dans l’appart car j’oubliais de sortir les poubelles… Pour l’anecdote, il donnait sur le stade Jean-Bouin, qui depuis a été refait. Je suivais de chez moi sa destruction et sa reconstruction. Le plus drôle, c’est que j’ai joué le match d’inauguration…

La première fois que… j’ai eu une paie (et comment je l’ai dépensée)

La même année, au centre de formation. Je gagnais 600 € par mois. Je m’en servais surtout pour payer ma bouffe et mon essence, même si je me suis aussi acheté une télé plus grande ! Je ne suis pas très dépensier ni matérialiste. Aujourd’hui encore, je préfère placer mon argent pour être tranquille. Une carrière de rugbyman, c’est court. C’est pour ça que j’essaie déjà de penser à ma reconversion en reprenant des études à Sciences po. Nous avons pas mal de temps libre et je préfère le passer à étudier plutôt qu’à regarder la télé ou à être sur les réseaux sociaux…

La première fois que… j’ai eu le déclic pour mon métier

C’est bizarre, mais je suis devenu pro presque sans m’en rendre compte. Je jouais surtout pour être avec mes copains et comme ils étaient très bons, j’essayais de me mettre au niveau. C’est venu comme ça. Mais j’ai vraiment su que je voulais faire rugbyman professionnel… après mon premier match en pro. J’avais 19 ans, on jouait contre des Italiens en Coupe d’Europe. On a gagné largement et j’ai été élu homme du match. À ce moment-là, je me suis dit : « Regarde le plaisir que tu as pris sur le terrain : si tu peux faire ça pendant quinze ans, ce serait pas mal… »

La première fois que… j’ai intégré le groupe des pros

C’était en début de saison, en pleine préparation physique. J’avais 18 ans. Je me suis alors rendu compte de l’écart qu’il y avait entre les jeunes et les pros : ils sont tous beaucoup plus costauds ! En plus, je joue numéro 10 et, au rugby, c’est lui qui donne les combinaisons. Et quand tu dois les donner à des joueurs qui sont là depuis dix ans et que tu as seulement vus à la télé, tu ne fais pas le fier !

La première fois que… j’ai eu une galère pro

J’ai eu une grosse blessure il y a deux ans, je me suis luxé l’épaule. J’ai été blessé trois mois. C’était l’année où l’équipe a été championne et j’ai manqué toute la fin de saison, notamment la finale… C’était très dur. C’était également l’année de la Coupe du monde. J’avais été titulaire lors des deux derniers matchs de l’équipe de France avant de me blesser. Peut-être que, sans cette blessure, j’aurais pu y aller…

La première fois que… j’ai porté le maillot de l’équipe de France

France-Angleterre, au Stade de France, le 1er février 2014. Je ne devais pas y participer : la semaine précédente, en stage, l’entraîneur avait renvoyé sept joueurs, dont moi. Mais un dimanche, je reçois un appel masqué. Je décroche et c’est Philippe Saint-André, le sélectionneur de l’époque, qui me dit : « Rejoins-nous, tu commences le match la semaine prochaine. » Ils étaient à Boulogne-Billancourt, moi à Bobigny : pour y aller, je suis passé devant le Stade de France et je me suis dit : « Dimanche, j’y serai ! »

Pendant ce match, je fais une bonne première période mais, au début de la seconde, une erreur de ma part entraîne un essai. Et, à la 50e minute, je suis pétri de crampes ! Jouer devant 80.000 personnes, face à l’Angleterre, c’était beaucoup de pression. Je n’ai pas demandé à sortir, sinon le coach aurait pensé que je n’étais pas prêt physiquement pour jouer à ce niveau.