Je suis le seul garçon de la classe : kiff total ou bad trip ?

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Publié le 12/12/2014 par TRD_import_OlivierVanCaemerbeke ,
Une bonne occasion de faire des rencontres ou plut ot la certitude de difficultes a s'integrer ? Une chance accrue de decrocher son diplome ou l'obligation de faire deux fois plus ses preuves pour etre pris au serieux ? Être le seul garçon de sa classe voire de son ecole : vous en avez reve ou peut-etre l'avez-vous redoute… Mais comment cela se passe-il, en vrai ?

Facile à vivre ou pas de se retrouver le seul élément masculin de sa classe ? // © iStock.

« Je savais qu’il y aurait peu de garçons dans ma classe et cela ne m’a pas freiné, mais je n’imaginais pas être seul… sur deux prépas ! » raconte Baptiste, 19 ans, en première année de l’Institut de formation en soins infirmiers à Reims (51). Se retrouver le seul élément masculin au milieu d’une classe, c’est aussi ce qui arrive à Florent. Ce Nîmois de 24 ans se prépare à devenir professeur des écoles à l’ESPE (École supérieure du professorat et de l’éducation) de Paris. « Je m’y attendais, puisque la filière attire un garçon pour 10 filles, explique celui qui partage ses heures de cours avec 20 futures maîtresses. Mais pour moi, cette profession n’a pas l’image d’un ‘métier de filles’. D’ailleurs, il y a cinquante ans, c’était surtout les hommes qui instruisaient les petits ; mon grand-père était instituteur ! En fait, je ne trouve pas que cela soit aussi stigmatisant qu’une profession très ‘genrée’ comme… sage-femme. »

Théo, étudiant maïeuticien : « Fier de participer à la mixité du métier »

Sage-femme – ou plus exactement maïeuticien –, voilà justement le métier qu’est en train d’apprendre Théo. À 24 ans, le jeune homme termine cette année son cursus à Rouen et, dans sa classe, il n’y a qu’un seul autre garçon. « La médicalisation de la profession ainsi que la première année que nous faisons en commun avec les étudiants en médecine, dentaire, pharma… ont un peu ouvert le métier aux hommes, mais cela reste marginal », regrette-t-il. La profession qui est accessible aux garçons depuis 1982 reste donc assez atypique pour ceux-ci. Du coup, lorsqu’on lui demande ce qu’il fait dans la vie, Théo a souvent l’impression de devoir défendre son choix d’études. Il est vrai aussi que certains garçons s’y engagent faute d’avoir obtenu un classement de fin de première année suffisant pour « faire médecine ». « Mais personne ne demandera jamais à une fille si elle est là à cause de son classement alors que c’est le cas pour une sur deux ! souligne Théo. Or sans une vraie passion pour ce métier, aucun garçon ne poursuivrait ces études difficiles ! »

Agnès Hébert, la directrice par intérim de l’école de Rouen, reconnaît qu’il peut être plus compliqué pour les garçons de se projeter dans leur futur métier. « C’est pourquoi nous les mettons autant que possible au contact d’hommes sages-femmes qui exercent déjà. Pour le reste, nous ne faisons aucune différence entre garçons et filles. Le niveau d’exigence est le même. »

Pour Baptiste, élève-infirmier : « J’aurais aimé avoir au moins deux mecs avec moi »

Théo ne cache pas sa « fierté » de participer à la mixité de ce métier et « de prendre ainsi part à une véritable avancée culturelle et sociale ». Baptiste a un regard un peu différent sur son statut. Il a beau être à l’aise dans ses études, il reconnaît que lorsque son entourage ou ses profs soulignent sa singularité de mâle esseulé, il trouve ça « assez lourd ». Et même s’il s’entend bien avec la plupart des filles de sa classe, l’infirmier ne considère pas sa situation comme une chance. « J’aurais bien aimé avoir au minimum deux mecs avec moi, ne serait-ce que pour parler de l’actualité sportive, de voitures, de motos, de jeux vidéo ou de mon sport, le hockey ».

« Sur 17 filles de ma classe, 15 sont en couple… »

Les trois garçons sont unanimes : les filles sont agréables, rarement moqueuses, jamais méchantes. Bref l’intégration est simple ; merci les filles ! « Les étudiantes sages-femmes ont bien sûr une fibre maternelle développée, confirme Agnès Hébert, et sont souvent très bienveillantes avec les garçons. » Pour autant, aucun des jeunes hommes interviewés ne se sent vraiment chouchouté et encore moins dragué.

« Sur 17 filles de ma classe, 15 sont en couple… et, oui, ça fait mal au moral, surtout que je suis célibataire ! sourit Baptiste. Je ne suis pas venu pour ça, mais j’espérais quand même me trouver une copine… c’est raté ! » L’enjeu n’est pas le même pour Théo et Florent qui sont déjà en couple. Si la copine de Florent ne lui a jamais fait part de son inquiétude face à la « concurrence », Théo lui reconnaît que sa petite amie ne voit pas forcément d’un bon œil l’aréopage féminin que côtoie son amoureux.

Une vraie chance pour réussir ?

Du côté des relations avec les professionnels, le bilan est contrasté pour Théo, le futur maïeuticien. « Les plus âgées laissent souvent entendre que je devrais orienter ma carrière vers un poste de cadre plutôt que de prendre en charge les futures mamans. » L’étudiant constate aussi que les garçons doivent redoubler d’efforts comparé aux filles, « notamment lors des stages où le niveau d’exigence est supérieur : nous devons plus que les filles faire nos preuves, montrer que l’on est capable et motivé. » Des remarques qui étonnent la directrice de l’école. « Ce métier est maintenant bien accepté par tous et beaucoup de cliniciens hommes ne sont pas dans l’encadrement. Pour moi, les a priori appartiennent au passé. »

Les profs me le disent : être un garçon est un avantage pour gagner l’attention du jury »

En tout cas, aucun des garçons n’estime que le fait d’être « rare » dans leur profession les aidera à trouver le poste de leurs rêves. Baptiste reconnaît toutefois que cela pourrait l’aider à décrocher son concours IFSI. « Si on réussit l’écrit, on peut passer l’oral, et le jury est à la recherche de garçons, car il y a 80 % de filles dans la profession. Les profs me le disent : être un garçon est un avantage pour gagner l’attention du jury. »

Florent, le futur instituteur connaît la « rumeur » qui dit que les garçons ont plus de chances au concours, mais n’y croit pas. « Le jury se base sur un barème objectif, sur des questions précises. Et puis, pendant nos cours, nos professeurs nous sensibilisent beaucoup aux questions relatives aux stéréotypes sociaux, à la mixité, etc. Ils sont donc attentifs à ne pas faire eux-mêmes de favoritisme dans un sens ou un autre. »

Ce qui est sûr, c’est que Théo, Florent et Baptiste ne regrettent pas leur choix de faire des études un peu différentes, symboles d’une égalité des sexes qu’il faut continuer à encourager. Et vous, auriez-vous aimé être le seul garçon de votre classe ? Cela vous est-il déjà arrivé ? Dites-nous tout !