« Je rate tout, je suis trop nul(le) » : stop #laloose !

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Publié le 10/04/2015 par TRD_import_MariaPoblete ,
De toute façon, c'est sur : votre expose, vous allez le louper, le bac, vous ne l'aurez jamais, et l'entretien pour votre prochain stage, vous allez le rater… Bref, vous vous sentez le (la) plus nul(le) du monde. Et si ça changeait ?

« Aussi loin que je m’en souvienne, à l’école, au collège, en natation, je croyais que je n’y arriverais jamais, je partais battu, d’ailleurs j’étais tellement sûr de ne jamais réussir que ça ne ratait pas, je me plantais, ou j’avais la sensation de rater, ou je m’efforçais de rater pour me prouver que j’avais raison de me croire le plus nul parmi les nuls ! », explique Marc-André, 20 ans, étudiant en deuxième année de licence d’économie-gestion à Rennes 1 (35).

Il n’est pas encore un grand optimiste, mais il a parcouru un bout de chemin sur cette voie. « C’est devenu une légende familiale et aussi une plaisanterie, poursuit-il. Mes parents racontent que, enfant, je faisais exprès de tomber, je me positionnais devant les cailloux pour trébucher ! On en rit, aujourd’hui, et j’ai compris que j’avais peur de ne pas arriver à la hauteur des hommes de ma famille, tous très énergiques. Au final, j’accepte cette filiation ! » Nicolas, son père, ajoute : « C’était déstabilisant pour tout le monde, pour ses frères et sœurs, pour nous, mais quand il disait qu’il était nul partout, nous lui expliquions que c’était faux, en donnant des exemples et en utilisant une arme vraiment efficace : l’humour. »

Positivez le quotidien

Le pédopsychiatre Alain Braconnier explique dans son ouvrage, « l’Enfant optimiste » (éditions Odile Jacob), que l’optimisme se cultive en famille et donne quelques pistes utiles. « L’optimisme fait partie intégrante de l’éducation, c’est une manière de se représenter ce qu’il va nous arriver, dit-il. Je n’ai pas de recette miracle, je pense cependant qu’ on peut apprendre à l’enfant et à l’adolescent à voir et à savoir reconnaître les choses agréables, les succès, afin qu’il se sente en confiance. « 

Déceler les réussites sans se focaliser sur ce qui échoue ou semble échouer, c’est le truc en plus de Léa, 17 ans, élève en terminale S au lycée Massillon à Paris. Léa est pétillante et souriante, une vraie publicité pour le bonheur. Collants bariolés, bonnet jaune, mitaines rapiécées, elle ressemble à Mary Poppins. « C’est ce que me disent mes copains, confie-t-elle avec un large sourire. Je vois le bien et le beau partout, sans m’en rendre compte, et cela ne me demande aucun effort ; je ne remarque jamais l’aspect sombre ou triste des situations. Je ne crois pas être une optimiste béate et niaise, je m’éloigne seulement des gens trop négatifs et je trouve toujours quelque chose de bien à ce qui m’arrive, à moi et à mon entourage. Je suis d’une nature enthousiaste, c’est de famille, on est comme ça, mes parents me disent que quand j’étais petite, j’étais partante pour tout, de bonne humeur, et j’aimais l’aventure ! »

Apprenez de vos erreurs

Sans le savoir, Léa applique la « psychologie positive », une méthode apparue dans les années 2000 qui livre des clés pour profiter du moment présent, développer l’estime de soi et la gratitude. « Ce n’est pas une vision simpliste de la vie qui s’applique, c’est juste du bon sens, bien apprendre sa valeur personnelle en avançant, car on apprend de ses réussites et de ses échecs, expose Jacques Lecomte, psychologue et fondateur de l’Association française et francophone de psychologie positive. Comme les adultes, les adolescents peuvent être acteurs de leur vie, la voir sous un beau jour, la transformer et faire en sorte de se dire qu’ils vont y arriver.  » Quitte à s’opposer à des choix qui ne sont pas les leurs.

Juliette, 19 ans, en L2 de droit à l’université d’Aix-en-Provence (13), décrit volontiers le chemin parcouru par son amie Marion, du même âge qu’elle, en licence de biologie. « Je parle à sa place parce qu’elle refuse d’évoquer son problème, signale Juliette. Je n’ai jamais vu une fille aussi négative, avec une si mauvaise opinion d’elle-même et une incroyable capacité à tout voir en négatif. Elle étudiait le droit à cause de son père, qui voulait qu’elle fasse son métier, commissaire-priseur, mais elle détestait ses études, sa vie, elle a commencé à fumer et à faire n’importe quoi. Elle s’enfonçait. Puis elle a pété un câble et a arrêté la fac au bout de trois mois. Elle a alors changé d’orientation. Maintenant, elle va super-bien, elle adore ses études et se projette dans l’avenir. C’est incroyable ! « 

Comptabilisez vos succès

« J’ai souvent une mauvaise opinion de moi, affirme Tristan, 16 ans, élève en 1re ES au lycée Voltaire à Paris. Quand je pense que je n’y arriverai jamais, que la montagne à franchir est trop haute, je rumine dans ma tête et j’aboutis en général à une espèce de brouillard, je ne vois plus rien. Si ça dure plus d’une journée, et si je sens que je n’en sors pas, je me dis stop ! et je me focalise sur du concret : je regarde mes notes, mes derniers contrôles, les appréciations, les corrigés, et je liste par écrit ce qui va bien et ce que je dois améliorer. C’est méthodique, ça me calme. Ça n’a l’air de rien, mais c’est énorme. En me rapprochant des épreuves, j’ai peur, bien sûr, de me planter, mais chaque jour un peu moins. » Précision utile : Tristan est l’un des meilleurs élèves de sa classe et les professeurs ne cessent de lui répéter qu’il aura des points d’avance !

Simon, 20 ans, en deuxième année de DUT (diplôme universitaire de technologie) carrières sociales à Paris-Diderot, se souvient de son pessimisme.  » À 15 ans, je broyais souvent du noir, en partie parce que l’ambiance à la maison était morose, en partie parce que j’avais une affreuse trouille de l’échec. J’avais la conviction, la croyance presque, que je ne réussirais jamais rien, que, par exemple, je n’obtiendrais jamais mon bac… Un jour, ma marraine m’a offert un calendrier, qu’elle avait commencé à remplir. Il y avait les dates de mon brevet avec les notes, mon stage de 3e dans une super-librairie, quelques fêtes d’anniversaire bien réussies… Elle l’a baptisé le ‘calendrier de mes succès’ ! Je l’ai gardé longtemps accroché dans ma chambre et j’ajoutais des événements, les notes au bac, mon brevet d’animateur… »

Combattez vos peurs

« C’est très bien de regarder en arrière en valorisant ce qui a été fait », assure Laurence Monce, psychologue et auteure de « Parent d’ado, mode d’emploi ! » (éd. Interéditions). « Quand ils mettent de bonnes lunettes, qui donnent une vision objective, les jeunes s’acceptent davantage. Ils sortent de leurs certitudes, qui limitent parfois et enferment. » Comme à bord d’un avion qui suivrait un plan de vol tracé à l’avance, vous vous laissez parfois aller à un train-train certes insatisfaisant mais… parfois confortable !  » L’année dernière, en 2nde, je me laissais souvent glisser sur une pente pas très gaie, j’étais agressive avec mes parents et persuadée d’être une naze ; mes copines m’ont secouée ! » avoue Lise, 16 ans, en 1re ST2S au lycée Bonaparte à Toulon (83).

Bien sûr, les peurs peuvent être envahissantes et entraîner des idées noires, mais à force de croire qu’on va rater… eh bien, on rate ! Votre cerveau ne fait pas la différence entre ce que vous montre la réalité et ce que vous dit votre inconscient. Si vous lui indiquez que vous avez obtenu votre bac brillamment, que vous avez réussi un concours ou que vous êtes sur le podium, et même si ce n’est pas (ou pas encore !) exact, votre cerveau, lui, l’enregistrera. « Pour cela, il est nécessaire de se projeter réellement dans son corps et ses émotions, déclare Lise Bartoli, psychologue et spécialiste de l’hypnose. Je ne parle pas d’objectif, je parle de résultat. C’est en sentant, dans son corps, les émotions de la réussite, le cœur qui bat, l’envie de sauter de joie, de crier « J’ai réussi !!! » et en envisageant comment on fête sa victoire… qu’on gagne.  » Exactement comme pour les sportifs. Alors, prêt(e), partez et… c’est gagné !

Avis d’expert : « L’important, c’est l’authenticité des faits »

Alain Braconnier est pédopsychiatre et auteur de « l’Enfant optimiste », éditions Odile Jacob.

« À l’adolescence, les échanges avec les autres servent à partager et à confronter les points de vue. Certains peuvent être optimistes, d’autres, pessimistes. Ce qui compte, c’est que l’adolescent réalise qu’il peut passer d’un état d’âme à un autre. Dans un groupe, même quand ils partagent des situations compliquées, il y en a toujours un qui introduit un autre regard, positif. Cela crée un rééquilibrage et, au final, c’est souvent l’optimisme qui l’emporte. Les jeunes veulent tous réussir, ils aiment aller bien. L’appui des parents aussi est précieux, mais il est inutile de répéter aux jeunes qu’ils sont formidables ou les plus intelligents. L’important, c’est l’authenticité. S’attacher aux faits, aux facteurs, sans jamais généraliser. »