Coming out : comment ça s’est passé pour eux

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Publié le 09/10/2017 par TRD_import_CarolineMichel ,
Une déclaration longuement préparée, un malentendu, une inspiration subite… Quelles que soient les circonstances, révéler son homosexualité à ses proches est une étape importante, mais qui suscite beaucoup d'appréhension. Témoignages.

“L’homosexualité n’est plus un tabou, les esprits sont plus ouverts. La société et les mœurs évoluent”, affirme Evelyne Dillenseger, sexologue et psychanalyste. Cependant, faire son coming out demeure difficile : comment la famille réagira-t-elle ? “Révéler son orientation sexuelle, c’est avouer la vérité sur sa sexualité aux autres, mais aussi à soi-même”, commente la spécialiste.

Une étape qui permet de se sentir mieux et de vivre librement sa sexualité, mais qui demande du courage, de la préparation… même si certains, par nécessité ou par choix, improvisent. Cinq témoins racontent à Trendy comment ils ont dévoilé leur homosexualité à leurs proches.

Arthur, 27 ans : “Quand ma mère m’a demandé le prénom de ma copine, j’ai répondu Pierre”

“J’ai su que j’étais attiré par les garçons quand j’avais 17 ans. Je ne regardais qu’eux. En particulier Pierre, avec qui j’ai commencé une relation. J’attendais de vivre une vraie histoire d’amour pour annoncer mon homosexualité à ma mère. Je préférais ouvrir la discussion en lui confiant que j’avais rencontré quelqu’un. Elle m’a répondu : ‘Super, comment elle s’appelle ?’ Il m’a suffi de prononcer : ‘Pierre’. Elle a très bien réagi.

Elle était heureuse pour moi, elle ne faisait pas semblant. Je me suis mis à pleurer, je m’en voulais d’avoir imaginé qu’elle ne supporterait pas ma révélation. Ma mère l’a dit à mon père, qui l’a très bien pris. Ma grand-mère, quant à elle, m’a dit que c’était une passade… Elle essayait de se rassurer et m’a même proposé de me faire soigner. Mon homosexualité n’était pas une passade, mais la réaction de ma grand-mère, oui : aujourd’hui, j’ai 27 ans, je suis en couple depuis trois ans avec Julien et elle l’adore.”

Clémence, 26 ans : “Mon père l’a bien pris : lui aussi, il préfère les filles !”

“Un jour, ma mère m’a demandé si je sortais avec Adeline. J’avais 16 ans. J’ai acquiescé sans développer. Elle s’est emportée, disant qu’elle ne comprenait pas. Elle m’a envoyé voir un psychiatre. J’ai tenu deux mois, ça ne me servait à rien. J’aimais les filles et les garçons, plutôt les filles, et c’était comme ça. D’un côté, j’assumais, je savais ce que je voulais ; d’un autre, j’avais un peu honte, je ne voulais pas que ma mère me trouve ‘anormale’.

C’est mon père qui m’a aidée à mieux vivre la situation. Suite à la réaction de ma mère, je suis allée le voir (ils sont séparés) pour faire mon coming out, même si je me doutais que ma mère s’était déjà chargée de l’annonce. J’ai demandé : ‘Alors ?’ Il a rétorqué : ‘Qu’est-ce que tu veux que ça me fasse ? Moi aussi, je préfère les filles !’ Cette phrase a été un doudou. Elle m’accompagnait partout. Quand ma mère était tendue parce que je courais rejoindre ma copine, je pensais à mon père. Une façon de ne pas flancher… Jusqu’à ce que je me sente mieux.”

Matthieu, 26 ans : “C’est mon frère qui a abordé le sujet… et je l’en remercie !”

“C’est mon petit frère qui a mis le sujet sur la table. Il avait 13 ans, moi 18. Il me voyait traîner avec mes copains et surtout Joffrey. Quand ma mère nous a demandé qui nous souhaitions inviter à nos anniversaires (nous sommes nés à quelques jours d’écart), mon frère a lancé : ‘Matthieu veut inviter son amoureux Joffrey.’ Son ton était plutôt innocent. Ma mère n’a pas réagi. Rien. Tremblant, je ne rêvais que d’une chose : que le sol s’ouvre sous mes pieds.

Une fois le dîner terminé, je me suis retrouvé face à ma mère. Elle m’a demandé : ‘Et tu veux inviter qui d’autre ?’ Une façon de me faire comprendre qu’elle acceptait parfaitement ce qu’elle venait d’entendre.”

Agnès, 25 ans : “Je me suis lancée en plein dîner de famille, de façon décalée”

“J’avais 20 ans. Des mois que je préparais un discours : papa, maman, petite sœur, je préfère les filles… Je travaillais mes mots, je m’y reprenais sans cesse et, dès que la situation était propice, je me dégonflais. Un soir de fête de famille, tout le monde parlait mariage. Forcément, les parents se tournent vers les plus jeunes : ‘Alors, vous voulez vous marier, vous ?’ Ma cousine a dit que oui, qu’elle attendait la robe blanche avec impatience.

J’ai répondu que oui, j’avais envie de me marier avec une fille ! De façon très spontanée, loin de tout ce que j’avais imaginé. Silence. Ma mère qui me dit : ‘Comment ça ?’ J’ai expliqué, simplement, que j’étais en couple avec Murielle. Mon père s’en doutait. Ma mère l’a plutôt bien pris, même s’il a fallu qu’on en rediscute plusieurs fois. Elle cherchait la petite bête : ‘Tu es sûre ?’, ‘Depuis quand ?’, ‘Pour toujours ?’… Finalement, mon annonce était plutôt originale et toute la famille en garde un bon souvenir.”

Damien, 30 ans : “Je croyais chatter avec ma sœur, mais je parlais à ma mère…”

“Je n’avais pas prévu de faire mon coming out. À 21 ans, je repoussais le moment parce que j’appréhendais la réaction de mes parents. J’étais en couple avec un garçon depuis plusieurs mois. Ma sœur était la seule au courant. Je discutais régulièrement avec elle sur MSN depuis que j’étais parti de la maison. Ma mère utilisait parfois le compte de ma sœur pour prendre de mes nouvelles. Généralement, elle me prévenait d’un ‘coucou, c’est maman’. Ce jour-là… non !

Je croyais que c’était ma sœur et je parlais de Teddy, mon petit ami. Ma mère est allée demander à ma sœur qui était ‘ce Teddy’. Elle s’est sentie prise au piège et m’a envoyé un SMS pour me prévenir. J’ai tout déballé à ma mère sur MSN… Elle ne l’a pas bien vécu. Les jours d’après, on discutait en ligne comme si de rien n’était mais, quand je suis rentré la voir le week-end, j’ai eu droit à des ‘Qu’est-ce que j’ai mal fait ?’, ‘Est-ce que je serai grand-mère un jour ?’, alors que mon père, lui, le vivait bien.

Ma mère me parlait de filles, comme pour me faire ‘changer d’avis’. J’ai fini par lui dire sans détour : ‘Maman, je suis gay, je n’aurai jamais de copine.’ Une façon de le lui annoncer une seconde fois, à l’oral. Elle ne m’a jamais rejeté, elle avait besoin d’être rassurée. D’entendre, tout simplement, qu’être homosexuel, ce n’est pas grave.”

L’important est de penser à vous

“Les témoignages montrent bien l’appréhension des jeunes adultes à révéler leur identité sexuelle qui, finalement, sont bien acceptés par leurs parents”, souligne Evelyne Dillenseger. Vos proches ont généralement besoin d’être rassurés, de sentir que vous êtes épanoui. “Un coming out est d’autant plus simple si vous avez confiance en vous et assumez pleinement votre homosexualité. Dites que vous êtes homosexuel et que vous êtes heureux”, conseille la sexologue et psychanalyste. Ouvrir la conversation par une phrase comme “Je vais t’annoncer quelque chose qui peut te perturber” plante un sombre décor.

L’important est de penser à vous et de montrer, à travers vos propos, que vous ne faites pas cette révélation pour qu’elle fasse l’objet d’un débat, mais pour vous confier. D’une certaine façon, il s’agit d’imposer qui vous êtes. N’adoptez pas une posture où vous semblez “demander l’autorisation” et qui laisse la place aux réactions négatives.

Si vous vivez mal votre coming out, vous pouvez en parler avec des personnes de votre entourage qui sauront vous soutenir ou avec un professionnel, psychologue ou sexologue.